
Comment identifier un abus bancaire dans une caution
Introduction
La caution est un outil juridique permettant au créancier de se prémunir contre le défaut de paiement du débiteur principal. Mais ce mécanisme peut donner lieu à des abus bancaires, qu’il s’agisse d’un soutien abusif à l’entreprise cautionnée, d’un cautionnement manifestement disproportionné, ou encore d’un manquement à l’obligation d’information. Identifier ces abus nécessite de comprendre les règles issues de la jurisprudence caution, des directives UE banque et les sanctions de l’abus bancaire prévues par la loi.
1. Le cadre légal et européen
1.1. Droit interne
En France, la caution est régie par les articles 2288 et suivants du Code civil. Les obligations d’information et de mise en garde sont renforcées par le Code de la consommation et la loi Scrivener.
1.2. Cadre européen – directive UE banque
Les directives européennes (notamment 2008/48/CE, 2013/36/UE et 2014/17/UE) imposent aux établissements bancaires des obligations de transparence et de proportionnalité, applicables indirectement aux cautionnements.
1.3. Notion d’abus bancaire dans une caution
Un abus bancaire peut résulter :
- D’un octroi ou maintien abusif de crédits à l’entreprise cautionnée (soutien abusif)
- D’un cautionnement manifestement disproportionné
- D’un manquement à l’obligation d’information ou de loyauté
2. Hypothèses principales d’abus bancaire
2.1. Soutien abusif à l’entreprise cautionnée
La jurisprudence caution sanctionne la banque qui maintient abusivement son concours à une entreprise en difficulté, aggravant la dette et le risque pour la caution.
La faute n’est retenue que si :
- La situation de l’entreprise était, au su de la banque, irrémédiablement compromise
- Ou si la trésorerie était hors norme, avec des frais financiers démesurés
Depuis l’article L. 650-1 du Code de commerce, la responsabilité de la banque est limitée en procédure collective, sauf en cas de fraude, d’immixtion caractérisée ou de disproportion manifeste entre concours et garanties.
2.2. Cautionnement manifestement disproportionné
Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un cautionnement qui, lors de sa conclusion, était manifestement disproportionné aux biens et revenus de la caution.
L’appréciation se fait :
- À la date de conclusion
- En tenant compte de l’endettement global de la caution
- Sur la base des déclarations de la caution, sauf anomalies apparentes
La charge de la preuve incombe à la caution. En cas de disproportion :
- Cautionnements après le 1er janvier 2022 : réduction de l’engagement (C. civ. art. 2300)
- Cautionnements antérieurs : décharge totale (C. consom. ex-art. L. 332-1)
2.3. Manquement à l’obligation d’information ou de loyauté
La banque doit informer la caution si la situation du débiteur est irrémédiablement compromise. La dissimulation intentionnelle constitue une réticence dolosive, sanctionnée par la nullité ou des dommages-intérêts.
3. Indices pratiques d’un abus bancaire
- Contrat illisible ou incomplet
- Absence de mise en garde adaptée
- Pression lors de la signature
- Clauses illimitées ou disproportionnées
4. La jurisprudence des clauses abusives pour les cautions
- 1re civ., 7 février 2001 : absence de durée maximale → annulation partielle
- 1re civ., 9 décembre 2009 : défaut d’information sur l’irrévocabilité
- CJUE, 13 septembre 2018 : obligation d’information claire et individualisée
5. Sanctions de l’abus bancaire
La sanction de l’abus bancaire varie selon la faute :
- Nullité du cautionnement (dol, disproportion)
- Réduction de l’engagement
- Dommages-intérêts
- Déchéance du droit aux intérêts (C. civ. art. 2302)
Conclusion
L’identification d’un abus bancaire dans une caution repose sur l’analyse du contrat, du contexte, de la proportionnalité de l’engagement et du respect des obligations d’information. La jurisprudence caution, les directives UE banque et les mécanismes de sanction de l’abus bancaire constituent les outils essentiels pour protéger la caution et rétablir l’équilibre contractuel.