Avocat en financement professionnel

Introduction

Le financement professionnel – sous forme de prêt, découvert, facilité de caisse, crédit-bail, ligne de trésorerie ou concours bancaire – constitue l’un des piliers de la vie économique des entreprises. Faire appel à un avocat en financement professionnel peut être crucial dans ces situations. Il est également l’une des sources de litiges les plus fréquentes entre les établissements bancaires et les professionnels : refus de crédit jugé infondé, rupture brutale d’un concours, dénonciation de facilité de caisse sans préavis, absence de mise en garde du dirigeant « non averti », octroi d’un prêt inadapté, manquements dans l’exécution d’un mandat bancaire.

Dans de nombreux dossiers, le problème apparaît dès l’octroi du crédit. Lorsqu’une banque refuse un financement de manière injustifiée ou contradictoire, il s’agit d’un refus de crédit professionnel, ouvrant potentiellement droit à recours.

Inversement, la banque peut mettre fin à un concours dans des conditions contraires à la loi. Cette situation renvoie à la problématique de la rupture abusive de crédit / dénonciation de concours, qui obéit à un régime juridique spécifique prévu par l’article L.313-12 CMF.

Enfin, le financement professionnel s’accompagne souvent de sûretés. L’analyse des garanties bancaires (hors caution) est essentielle pour vérifier la régularité des sûretés prises et la possibilité de les contester.

Les obligations de la banque, les irrégularités les plus fréquentes et les recours possibles sont détaillés dans cette page, ainsi que leurs liens avec la responsabilité bancaire plus globale, et les litiges connexes tels que ceux relatifs aux instruments de paiement professionnels ou au contentieux du compte professionnel.


1. Les différents types de financements professionnels

Chaque mode de financement répond à un régime juridique spécifique.

1.1. Le crédit professionnel amortissable

Le crédit amortissable constitue le financement classique d’un investissement. Il peut être complété par des garanties diverses dont la régularité doit parfois être vérifiée au regard des règles applicables aux garanties bancaires (hors caution).

1.2. Facilités de caisse et découverts

Les facilités de caisse et découverts autorisés sont des concours à durée indéterminée.
En cas de suppression brutale ou sans préavis suffisant, ces situations relèvent fréquemment de la rupture abusive de crédit / dénonciation de concours.

1.3. Lignes de crédit et financements court terme

Les réductions soudaines de lignes de trésorerie, souvent sans explication, peuvent entraîner un incident de gestion du compte bancaire et générer un contentieux du compte professionnel.

1.4. Crédit-bail

Le crédit-bail implique des obligations d’information et d’exécution. Lorsqu’il est mal exécuté, la banque ou l’établissement de crédit peut engager sa responsabilité bancaire.

1.5. Les garanties demandées aux dirigeants

Presque tous les crédits professionnels exigent une caution personnelle du dirigeant. Les irrégularités dans la mise en garde, la proportionnalité et la rédaction sont des fondements classiques de contentieux.

Le financement professionnel s’accompagne fréquemment de garanties bancaires (hors caution), dont la validité et la proportionnalité doivent être vérifiées avec précision


2. Les obligations légales de la banque en matière de financement professionnel

Contrairement à une idée répandue, la banque n’a pas d’obligation d’octroyer un crédit.
Mais elle a des obligations strictes lorsqu’elle accepte d’accorder un concours.

2.1. Obligation d’information précontractuelle

La banque doit fournir :

  • les conditions générales,
  • le taux contractuel,
  • l’ensemble des frais,
  • les modalités de remboursement,
  • les clauses de déchéance,
  • les garanties requises.

La banque doit informer clairement l’entreprise de toutes les conditions. En cas de manquements graves durant cette phase, on peut se retrouver face à un refus de crédit professionnel fautif.

2.2. Obligation d’analyse sérieuse de la situation de l’entreprise

Même si le Code de la consommation ne s’applique pas ici, la jurisprudence impose à la banque :

  • de vérifier la situation financière de l’entreprise,
  • d’examiner la soutenabilité du crédit,
  • d’alerter en cas de risque manifeste d’endettement excessif.

Si la banque accorde un crédit inadapté à une entreprise en difficulté, elle peut commettre un crédit fautif, entraînant sa responsabilité bancaire.

2.3. Obligation de mise en garde du dirigeant “non averti”

Depuis l’arrêt fondateur “Claudel”, la Cour de cassation impose au banquier d’avertir un dirigeant non averti des risques de l’opération, en particulier lorsqu’il se porte caution personnelle.

Éléments de mise en garde :

  • situation financière,
  • capacité de remboursement,
  • risque de défaillance,
  • conséquences patrimoniales.
  • Un financement litigieux peut mener au surendettement

La mise en garde s’articule régulièrement avec les problématiques relatives aux sûretés, notamment en matière de garanties bancaires (hors caution).

2.4. Interdiction de maintenir artificiellement une entreprise en difficulté

Le banquier engage sa responsabilité s’il maintient un concours alors qu’il connaît :

  • la cessation des paiements,
  • l’insolvabilité certaine,
  • un risque majeur pour les créanciers.

C’est la théorie de l’octroi de crédit fautif.

Le maintien fautif peut être sanctionné en tant que manquement grave engageant la responsabilité bancaire.

2.5. Obligation de respecter les usages bancaires

Usages professionnels :

  • préavis de rupture,
  • information loyale,
  • non-modification abusive des conditions,
  • traitement non discriminatoire.

3. Rupture et dénonciation des concours bancaires

3.1. Le principe : liberté de rupture

Le banquier peut rompre un concours à durée indéterminée (découvert, facilité de caisse, ligne de crédit).
Mais la rupture doit être :

  • motivées par un intérêt légitime,
  • notifiée par écrit,
  • précédée d’un préavis raisonnable,
  • dépourvue d’abus.

3.2. Article L.313-12 CMF : le texte essentiel

La banque doit respecter :

  • un préavis de 60 jours en principe,
  • sauf en cas de comportement gravement répréhensible du client,
  • ou situation irrémédiablement compromise.

3.3. Rupture abusive

La rupture est abusive si :

  • le délai est insuffisant,
  • la motivation est incertaine,
  • la banque a contribué à créer la situation de tension,
  • la rupture est intervenue brutalement.

Sanctions possibles :

  • indemnisation du préjudice,
  • réparation de la perte d’opportunité,
  • restitution de frais indus.

Toute rupture de concours doit respecter le préavis prévu par l’article L.313-12 CMF. Si ce n’est pas le cas, le dossier relève de la rupture abusive de crédit / dénonciation de concours, dont l’entreprise peut demander réparation.

De nombreuses ruptures entraînent ensuite un contentieux du compte professionnel (solde débiteur artificiel, agios injustifiés, incidents de paiement).

3.4. Rupture discriminatoire ou disproportionnée

La banque ne peut :

  • modifier les conditions de façon exorbitante,
  • réduire le crédit sans raison,
  • refuser un renouvellement sans justification objective.

4. Refus de crédit professionnel : quand la décision peut être contestée

4.1. Le banquier n’a pas d’obligation de prêter…

Mais il doit respecter :

  • la loyauté,
  • la transparence minimale,
  • l’absence de discrimination,
  • l’absence de contradiction avec des engagements antérieurs.

4.2. Refus fautif

Le refus peut être fautif lorsque :

  • la banque refuse après avoir accepté un accord de principe,
  • la décision est discriminatoire ou incohérente,
  • le refus intervient alors que le dossier est complet et conforme aux critères internes.

Lorsque la banque laisse croire à un financement possible avant de se rétracter brutalement, on parle de refus de crédit professionnel fautif, susceptible d’engager la responsabilité précontractuelle.

4.3. Conséquences

  • indemnisation de pertes,
  • réparation du préjudice moral du dirigeant,
  • action en responsabilité contractuelle.

5. Octroi de crédit fautif : un contentieux fréquent

5.1. Le principe

Le crédit est fautif si la banque prête à une entreprise :

  • manifestement insolvable,
  • en cessation de paiements,
  • ou en situation irrémédiablement compromise.

5.2. Conséquences

La banque peut être condamnée à :

  • supporter les pertes,
  • indemniser les autres créanciers,
  • prendre en charge une partie du passif.

Un mauvais financement peut entraîner des effets en cascade, notamment sur les garanties. Il est souvent nécessaire d’examiner les sûretés prises au regard des garanties bancaires (hors caution).

5.3. Critères d’appréciation

  • analyse financière insuffisante,
  • incohérence entre le montant accordé et les capacités de remboursement,
  • absence de garanties raisonnables.

6. Les irrégularités les plus fréquentes dans les financements professionnels

Certaines irrégularités de financement provoquent des incidents sur les moyens de paiement.
Les dossiers doivent alors être analysés à la lumière des règles applicables aux instruments de paiement professionnels.

6.1. Dénonciation sans préavis

Violation de L.313-12 CMF.

6.2. Rupture abusive sans justification

Très souvent sanctionnée.

6.3. Modifications unilatérales

Hausse du taux, réduction du plafond, nouvelles garanties imposées → abus possibles.

6.4. Crédit-bail mal exécuté

Livraison du bien, maintenance, conformité.

6.5. Défaut de mise en garde du dirigeant caution

Cause fréquente d’annulation partielle ou totale de l’engagement.

6.6. Pratiques trompeuses

Présentation inexacte du coût réel du crédit.


7. Recours possibles pour l’entreprise et le dirigeant

Les recours varient selon le manquement :

7.1. Contestation de la rupture de crédit

Devant le tribunal judiciaire ou commercial, selon le cas.

7.2. Action en responsabilité contractuelle

Les manquements commis lors de l’octroi, du maintien ou de la rupture d’un financement peuvent engager la responsabilité bancaire de l’établissement

Fondement :

  • rupture abusive,
  • défaut d’information,
  • mise en garde insuffisante.

7.3. Demande de dommages et intérêts

Exemples :

7.4. Contestation de l’engagement de caution

Sur les fondements :

  • disproportion,
  • défaut de mise en garde,
  • information annuelle manquante.

7.5. Recours amiables


8. Cas pratiques rencontrés en contentieux

Les exemples concrets ci-dessous recoupent souvent plusieurs thématiques, notamment la responsabilité bancaire, les sûretés irrégulières ou le fonctionnement du compte professionnel.

Cas n°1 : Rupture brutale d’un découvert

Une entreprise se voit retirer son découvert en 48 h → violation manifeste de L.313-12 → indemnisation.

Cas n°2 : Crédit accordé à une entreprise déjà en difficulté

Crédit octroyé alors que les bilans démontrent l’insolvabilité → crédit fautif → responsabilité bancaire.

Cas n°3 : Dirigeant “non averti” caution sans mise en garde

La caution est jugée disproportionnée → annulation partielle.

Cas n°4 : Refus discriminatoire de crédit

La banque refuse un financement sans motif objectif → condamnation possible.

Cas n°5 : Réduction unilatérale d’une ligne de trésorerie

Réduction drastique sans délai → rupture abusive.


9. Tableau récapitulatif des problématiques et sanctions

ProblèmeTexteSanctionRecours
Rupture de crédit sans préavisL.313-12 CMFIndemnisationTribunal
Rupture abusiveJurisprudenceD&ITribunal
Crédit fautifResponsabilitéDommagesTribunal
Défaut de mise en gardeJurisprudenceAnnulation cautionJuge
Modification abusiveResponsabilitéRéparationTribunal
Refus fautifCivilRéparationTribunal

Conclusion

Le financement professionnel est un domaine technique où les obligations du banquier sont nombreuses : information, loyauté, préavis, mise en garde, cohérence dans l’octroi et la rupture des concours.
Lorsque ces obligations ne sont pas respectées, l’entreprise et son dirigeant disposent de recours réels permettant de faire constater une rupture abusive, une faute dans l’octroi du crédit ou un manquement dans l’exécution du contrat.

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