Les litiges bancaires

Qu’est-ce que le recours cambiaire ? 

Qu'est-ce que le recours cambiaire ? Le droit cambiaire constitue une branche technique du droit commercial et du droit bancaire, régissant les effets de commerce tels que la lettre de change, le chèque ou le billet à ordre.

Au cœur de ce dispositif juridique se trouve le recours cambiaire, mécanisme essentiel permettant au porteur d'un titre de recouvrer sa créance en cas de défaut de paiement.

Définition du recours cambiaire

Le recours cambiaire est l'action en justice dont dispose le porteur d'un effet de commerce contre les différents signataires de ce titre lorsque le paiement n'a pas été honoré à l'échéance.

Tous les signataires d'un effet de commerce sont tenus solidairement envers le porteur, qui peut ainsi agir contre l'un quelconque d'entre eux sans avoir à respecter un ordre particulier.

La force du recours cambiaire réside précisément dans cette autonomie : le porteur dispose d'un titre exécutoire dont l'efficacité ne dépend pas de la validité de la relation commerciale sous-jacente.

Les différents types de recours cambiaires

Le recours en cas de défaut de paiement (lettre de change, billet à ordre)

La lettre de change et le billet à ordre sont les deux principaux effets de commerce donnant lieu à recours cambiaire.

Conformément aux articles du Code de commerce, le porteur de la lettre peut exercer son recours contre le tireur, les endosseurs, l'accepteur et les autres signataires dès lors que le paiement n'a pas été effectué à l'échéance.

Le recours en cas de défaut de paiement d'un chèque sans provision

Le chèque sans provision constitue un cas particulier dans le droit cambiaire français.

Le porteur peut agir contre le tireur du chèque en cas de défaut de provision sur le compte bancaire, mais également contre les endosseurs éventuels.

La procédure judiciaire applicable au chèque sans provision se distingue par sa rapidité.

Le bénéficiaire dispose d'un délai d'un an à compter de l'expiration du délai de présentation pour engager son action.

Cette prescription brève impose une vigilance particulière dans la mise en œuvre du recours.

Mise en œuvre des recours cambiaires : étapes clés

La protestation du défaut de paiement

Le protêt constitue la première étape formelle du recours cambiaire.

Cet acte, dressé par un huissier de justice, constate officiellement le défaut de paiement ou le défaut d'acceptation.

Pour la lettre de change, le protêt doit être établi dans les délais légaux suivant l'échéance ou la présentation, sous peine de perdre le droit d'exercer le recours contre les endosseurs, le tireur et les autres obligés cambiaires.

Toutefois, le Code de commerce prévoit une dispense de protêt lorsque la clause « sans frais » ou « sans protêt » a été apposée sur le titre. 

La notification aux débiteurs

Après avoir fait dresser le protêt ou constaté le défaut de paiement, le porteur doit notifier ce défaut aux différents obligés cambiaires.

Cette notification doit intervenir dans un délai de quatre jours ouvrables suivant le jour du protêt.

Chaque endosseur qui reçoit cette notification dispose à son tour de deux jours ouvrables pour informer son propre endosseur, et ainsi de suite en remontant la chaîne des signatures.

Les délais de prescription

L'action du porteur contre le tiré accepteur ou contre les autres signataires d'un billet à ordre se prescrit par trois ans à compter de la date d'échéance.

En revanche, les recours du porteur contre les endosseurs, le tireur et les autres obligés (à l'exception de l'accepteur) se prescrivent par un an à compter de la date du protêt dressé en temps utile, ou de la date d'échéance en cas de clause « sans frais ».

Les recours des endosseurs entre eux et contre le tireur se prescrivent par six mois à compter du jour où l'endosseur a remboursé la lettre ou du jour où il a été lui-même actionné.

Les acteurs du recours cambiaire

Le porteur

Le porteur d'une lettre de change ou de tout autre effet de commerce est le bénéficiaire du titre, celui qui détient le droit de créance.

Il peut s'agir du bénéficiaire initial ou d'un endossataire ayant acquis le titre par endossement.

Le porteur dispose du droit d'agir contre tous les signataires de manière indifférenciée, ce qui constitue un avantage considérable par rapport aux actions de droit commun.

Les endosseurs

Les endosseurs sont les personnes qui ont transmis la lettre de change ou le billet à ordre par endossement.

Chaque endosseur garantit le paiement du titre et peut être actionné par le porteur en cas de défaut.

Les endosseurs disposent eux-mêmes d'un recours contre les signataires antérieurs après avoir réglé le porteur.

Ce mécanisme de cascade garantit une répartition équitable de la charge du défaut de paiement entre les différents intervenants.

Le tireur

Le tireur est la personne qui crée et émet la lettre de change. Il donne l'ordre au tiré de payer une certaine somme au profit du bénéficiaire.

Le tireur garantit l'acceptation et le paiement de la lettre, sauf clause contraire. L'action contre le tireur constitue souvent le recours principal du porteur, particulièrement lorsque le tiré n'a pas accepté la lettre.

Dans le cas du chèque, le tireur est le titulaire du compte bancaire qui émet le titre. Sa responsabilité est engagée en cas de défaut de provision.

L'avaliseur

L'avaliseur est le garant d'un effet de commerce. Il s'engage à payer le montant du titre en cas de défaillance du débiteur principal.

L'aval peut être donné pour le tireur, le tiré, un endosseur ou tout autre signataire.

Cette garantie, qui résulte d'une signature apposée sur le titre ou sur une allonge, renforce considérablement la sécurité du porteur.

L'avaliseur est tenu de la même manière que celui qu'il avalise. Il peut donc être actionné directement par le porteur et dispose des mêmes moyens de défense que le débiteur garanti. 

L'importance du formalisme dans le droit cambiaire

Le droit cambiaire est un droit formaliste par excellence.

Une lettre de change doit ainsi comporter obligatoirement certaines mentions :

  • la dénomination de « lettre de change »,
  • le mandat pur et simple de payer une somme déterminée,
  • le nom du tiré,
  • l'indication de l'échéance,
  • du lieu de paiement,
  • du bénéficiaire,
  • de la date et du lieu de création,
  • la signature du tireur.

L'absence d'une seule de ces mentions de forme entraîne la nullité du titre en tant que lettre de change, privant ainsi le porteur des avantages du régime cambiaire.

Il ne pourra alors agir que sur le fondement du droit commun, ce qui réduit considérablement ses chances de recouvrement.

Distinguer le recours cambiaire du rapport fondamental

Cette distinction constitue l'un des principes fondamentaux du droit cambiaire.

Le rapport fondamental est la relation juridique initiale ayant donné naissance à la créance : contrat de vente, prêt, prestation de services, etc.

Le recours cambiaire, quant à lui, trouve son fondement exclusivement dans l'effet de commerce lui-même.

Cette autonomie de l'obligation cambiaire par rapport à la cause de la créance présente un double avantage :

  • D'une part, le porteur peut exercer son action cambiaire sans avoir à prouver l'existence ou la validité du rapport fondamental. Le titre se suffit à lui-même.
  • D'autre part, les exceptions tirées du rapport fondamental (contestation sur la qualité de la marchandise, vice du consentement, résolution du contrat) ne sont pas opposables au porteur de bonne foi qui a acquis le titre par endossement.

De même, les exceptions personnelles au porteur demeurent opposables, notamment lorsque celui-ci a agi sciemment au détriment du débiteur.

Lorsque je conseille mes clients créanciers, je privilégie généralement le recours cambiaire pour sa rapidité et son efficacité.

Toutefois, dans certains cas, une action fondée sur le rapport fondamental peut s'avérer plus pertinente, notamment lorsque le titre présente un vice de forme ou lorsque tous les délais cambiaires sont prescrits.

Avocat Pierre

Je suis Maître Pierre, avocat en droit bancaire inscrit au barreau de Paris depuis 2003. Vous rencontrez une problématique et avez besoin d'aide ? Discutons-en.


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