Les litiges bancaires

Effacement de dettes : le vrai cadre juridique expliqué

Face à des difficultés financières insurmontables, nombreux sont les particuliers qui s'interrogent sur la possibilité d'effacer leurs dettes. Pour comprendre l'effacement de dettes : le vrai cadre juridique, loin des idées reçues, il est important de s'informer correctement.

Entre espoirs souvent démesurés et méconnaissance du cadre légal, il est essentiel de clarifier ce que recouvre réellement l'effacement des dettes en France.

En tant qu'avocat en surendettement, j'accompagne régulièrement des personnes surendettées dans leurs démarches auprès de la Banque de France et de la commission de surendettement.

Voici un éclairage complet sur cette procédure méconnue, ses conditions strictes et ses véritables conséquences.

Qu'est-ce que l'effacement des dettes ? Définition et principe

Effacement de dettes : de quoi parle-t-on exactement ?

L'effacement de dettes constitue une mesure exceptionnelle prévue par le Code de la consommation dans le cadre de la procédure de surendettement.

Il s'agit d'un dispositif destiné aux personnes physiques qui se trouvent dans l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de leurs dettes, malgré leur bonne foi.

Cette solution de dernier recours intervient lorsque la situation financière du débiteur est irrémédiablement compromise, c'est-à-dire lorsqu'aucun plan de remboursement, même étalé dans le temps, ne permettrait d'apurer l'endettement.

Le principe repose sur une analyse approfondie de la capacité de remboursement du demandeur par la commission de surendettement de la Banque de France.

Celle-ci examine l'ensemble des ressources, des charges, du patrimoine et des dettes pour déterminer si un rétablissement de la situation est envisageable ou non.

Les dettes sont-elles réellement effacées ?

Contrairement à une idée reçue, toutes les dettes ne disparaissent pas automatiquement. L'effacement peut être total ou partiel selon les situations.

Dans certains cas, la commission ordonne un effacement partiel des dettes, permettant au débiteur de conserver une partie de ses obligations financières à un niveau soutenable.

Dans d'autres situations, lorsque la capacité de remboursement est nulle et le patrimoine inexistant ou insuffisant, un effacement total peut être prononcé dans le cadre d'une procédure de rétablissement personnel.

Il est fondamental de comprendre que cet effacement n'est pas une récompense mais une mesure de dernier recours encadrée par des conditions strictes. Le débiteur doit respecter un certain nombre d'engagements et sa bonne foi est systématiquement vérifiée.

Qui peut bénéficier d'un effacement de dettes ? Conditions d'éligibilité

L'accès à la procédure de surendettement, et donc à un éventuel effacement des dettes, est soumis à plusieurs conditions cumulatives.

D'abord, le demandeur doit être une personne physique, particulier domicilié en France.

Les dettes professionnelles sont expressément exclues du dispositif, qui ne concerne que les crédits et dettes de nature personnelle liés à la consommation.

La condition essentielle réside dans la bonne foi du débiteur.

La commission vérifie que la situation d'endettement n'a pas été volontairement créée ou aggravée par des dépenses manifestement excessives au regard des ressources.

Ont ainsi été créés ou contractés des crédits sans intention réelle de les rembourser constituerait un obstacle rédhibitoire.

Enfin, la situation financière doit être caractérisée par une impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble des dettes exigibles et à échoir.

Cette impossibilité s'apprécie au regard des revenus, du patrimoine mobilier et immobilier, et de la capacité prévisible de remboursement.

Un simple déséquilibre temporaire ne suffit pas : la situation doit être structurellement compromise.

Comment obtenir l'effacement de ses dettes ? La procédure de surendettement expliquée

Déposer un dossier de surendettement auprès de la commission de surendettement

La première étape consiste à déposer un dossier complet auprès de la commission de surendettement des particuliers de votre département, gérée par la Banque de France.

Il est désormais possible de réaliser l'ensemble de la procédure en ligne via le service dédié, ce qui facilite grandement les démarches pour les personnes à mobilité réduite ou éloignées des services de la Banque de France.

Le dossier doit comporter un formulaire détaillé retraçant l'ensemble de votre situation :

  •  état civil,
  • composition du foyer,
  • revenus de toutes natures,
  • charges courantes,
  • patrimoine (biens mobiliers et immobiliers)
  • la liste exhaustive de tous vos créanciers avec le montant précis de chaque dette.

Le déroulement de la procédure : examen et décision de la commission

Dans un premier temps, elle vérifie la recevabilité du dossier, c'est-à-dire que toutes les conditions d'éligibilité sont remplies.

Le demandeur et les créanciers en sont informés par lettre recommandée.

La recevabilité entraîne automatiquement l'inscription au Fichier national des Incidents de remboursement des Crédits aux Particuliers (FICP) pour une durée maximale de 5 ans.

Durant l'examen du dossier, la commission peut entendre le débiteur et les créanciers, demander des informations complémentaires, ou mandater un travailleur social pour une enquête sur place.

L'objectif est d'obtenir une vision complète et objective de la situation financière réelle.

Les solutions proposées : plan de remboursement ou effacement

À l'issue de l'instruction, la commission de surendettement peut proposer plusieurs mesures adaptées à la situation du débiteur :

  • Si une capacité de remboursement existe, même modeste, elle privilégiera un plan conventionnel de redressement négocié avec les créanciers.
  • Ce plan peut prévoir un rééchelonnement des dettes sur une durée pouvant aller jusqu'à sept ans, voire plus dans certains cas, une réduction du taux d'intérêt, ou un report temporaire des échéances.
  • Si aucun plan n'est envisageable, la commission peut recommander des mesures imposées, incluant potentiellement un effacement partiel de certaines dettes.

Enfin, dans les situations les plus critiques où le débiteur ne possède que des biens insaisissables ou un patrimoine insuffisant, et aucune capacité de remboursement, la commission peut orienter vers une procédure de rétablissement personnel avec ou sans liquidation judiciaire, aboutissant à un effacement total des dettes éligibles.

Quelles dettes peuvent être effacées par la commission de surendettement ?

Les dettes généralement effaçables

La procédure de surendettement concerne principalement les dettes de consommation courante :

Les dettes non effaçables

Il s'agit notamment :

  • des dettes alimentaires (pensions alimentaires destinées aux enfants ou au conjoint),
  • des amendes pénales prononcées par une juridiction, des réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d'une condamnation pénale,
  • des dommages et intérêts résultant de l'engagement de la responsabilité du débiteur pour une faute intentionnelle.

Les conséquences d'un effacement de dettes pour l'emprunteur et les créanciers

Conséquences immédiates pour le débiteur

Les poursuites des créanciers cessent immédiatement dès la notification de la décision.

L'inscription au FICP, fichier national géré par la Banque de France, persiste toutefois pendant une durée de cinq ans maximum à compter de la décision de rétablissement personnel.

Le débiteur doit également comprendre que cette mesure exceptionnelle n'est accordée qu'une seule fois. Il ne pourra plus bénéficier d'un nouvel effacement par la suite, sauf circonstances tout à fait exceptionnelles.

Une gestion rigoureuse de son budget et de ses engagements financiers devient donc impérative pour éviter toute rechute.

Si le débiteur est propriétaire d'un bien immobilier, la procédure peut entraîner une liquidation de cet actif pour désintéresser les créanciers, sauf si le bien constitue la résidence principale et que sa valeur est modeste au regard de l'endettement total. Le juge peut alors décider de son maintien dans le patrimoine du débiteur.

Impact sur les créanciers et les banques

Pour les créanciers, qu'il s'agisse d'établissements bancaires, d'organismes de crédit ou de fournisseurs, l'effacement constitue une perte sèche.

La créance est définitivement éteinte et ne pourra plus être recouvrée. Les banques et organismes financiers provisionnent généralement ces risques dans leur comptabilité.

Les créanciers conservent néanmoins le droit de contester la décision de la commission s'ils estiment que les conditions légales ne sont pas réunies ou que la bonne foi du débiteur est douteuse.

Recours possibles en cas de refus d'effacement des dettes

Contester la décision auprès de la commission de surendettement

Si la commission de surendettement rejette la demande d'effacement ou propose des mesures jugées inadaptées par le débiteur, celui-ci dispose d'un délai légal de quinze jours pour contester la décision.

Ce recours s'effectue auprès de la commission elle-même, par lettre recommandée avec accusé de réception.

Le débiteur doit motiver précisément son désaccord en apportant, si possible, des éléments nouveaux ou en démontrant une erreur d'appréciation.

La commission réexamine alors le dossier à la lumière des arguments présentés.

Ce premier niveau de recours permet souvent de corriger des incompréhensions ou de prendre en compte des éléments qui n'avaient pas été suffisamment valorisés lors de la première instruction.

Saisir le tribunal judiciaire

En cas de maintien du refus ou si les mesures proposées demeurent inacceptables, le débiteur peut saisir le juge du tribunal judiciaire.

Cette saisine doit intervenir dans un délai précis suivant la notification de la décision contestée.

Le juge dispose de pouvoirs étendus : il peut modifier les mesures proposées par la commission, imposer un plan de redressement différent, ou ordonner une procédure de rétablissement personnel si les conditions légales sont réunies.

L'assistance d'un avocat devient alors indispensable pour présenter efficacement les arguments juridiques et défendre au mieux les droits du débiteur. Le tribunal examine l'ensemble de la situation et statue en considération de l'équilibre à trouver entre la protection du débiteur de bonne foi et les droits légitimes des créanciers.

Foire aux questions (FAQ) sur l'effacement des dettes

Comment effacer ses dettes sans avoir à payer ?

Un effacement total sans aucun remboursement n'est possible que dans des situations très spécifiques où le débiteur ne dispose d'aucune capacité de remboursement et d'aucun actif saisissable.

Il faut déposer un dossier de surendettement complet auprès de la commission de surendettement et démontrer que la situation financière est irrémédiablement compromise. La procédure de rétablissement personnel constitue alors la seule issue, sous réserve de satisfaire à toutes les conditions légales, notamment la bonne foi.

Est-il possible de réaliser son dossier de surendettement entièrement en ligne ?

Oui, depuis quelques années, la Banque de France a développé un service en ligne permettant de déposer et de suivre un dossier de surendettement intégralement par voie dématérialisée.

Le site officiel de la Banque de France propose un accès sécurisé avec la possibilité de télécharger directement l'ensemble des pièces justificatives et de suivre l'avancement de la procédure.

Combien de temps dure une procédure de surendettement ?

L'examen initial de recevabilité intervient généralement dans un délai de quelques semaines à trois mois.

Si un plan conventionnel est proposé, sa mise en œuvre peut s'étaler sur plusieurs années, jusqu'à sept ans voire plus.

En revanche, une procédure de rétablissement personnel peut aboutir à un effacement total en quelques mois, généralement entre trois et douze mois, en fonction notamment de l'existence ou non de biens à liquider.

Il convient d'être patient car les services de la commission de surendettement traitent un volume important de dossiers.


En conclusion

En tant qu'avocat, je ne peux que recommander aux personnes en difficulté de se faire accompagner dès les premiers signes de fragilité financière. Un conseil juridique adapté permet d'optimiser les chances de réussite de la procédure, d'éviter les erreurs qui pourraient compromettre le dossier, et surtout de comprendre pleinement les droits et obligations qui en découlent.

Avocat Pierre

Je suis Maître Pierre, avocat en droit bancaire inscrit au barreau de Paris depuis 2003. Vous rencontrez une problématique et avez besoin d'aide ? Discutons-en.


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