La preuve du devoir de mise en garde du crédit-bailleur à l’égard de la caution
Une société a conclu avec la société BNP Paribas Lease Group plusieurs contrats de crédit-bail. Les gérants se sont rendus caution solidaire.
La société a fait l’objet d’une procédure collective, et le crédit-bailleur a assigné les cautions en paiement. lesquelles ont, à titre reconventionnel, recherché sa responsabilité pour manquement à son devoir de mise en garde.
1) Sur le rejet par la Cour d’appel de la demande en responsabilité des cautions contre le credit bailleur.
En considération des fonctions qu’il exerçait au sein de la société débitrice principale, le gérant ne peut raisonnablement soutenir qu’il ne disposait pas des informations nécessaires à l’appréciation de la portée de ses engagements, l’état des comptes de l’entreprise, de ses charges et des engagements financiers ne pouvant en effet être inconnus de sa part.
Aussi, il ne peut être considéré comme une caution profane. De plus, la caution ne rapporte pas la preuve que l’établissement bénéficiaire de sa garantie avait sur ses revenus, son patrimoine et ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles au regard de l’opération entreprise, des informations que lui-même aurait ignores.
La Cour d’appel précisé que les cautions ne rapportent nullement la preuve de ce qu’elles étaient profanes et qu’elles n’avaient nullement été mises en garde ; qu’il convient en effet de souligner qu’ils étaient cogérants de la société, et en cette qualité, il est difficilement concevable de penser qu’ils ignoraient les conséquences d’un cautionnement. De plus, ce cautionnement a été réitéré à plusieurs reprises pour de nouveaux contrats.
C’est dans ces conditions que la Cour d’appel les condamne solidairement au paiement des sommes réclamées.
2) Sur les moyens invoqués par les cautions contre la décision de la Cour d’appel
Les cautions rappellent que établissement de crédit est tenu d’une obligation de mise en garde à l’égard de la caution non avertie, au regard de ses capacités financières et des risques de l’endettement né de l’engagement de caution.
Pour se voir reconnaître la qualité de caution avertie, la caution doit être en mesure de discerner et de mesurer le risque de l’endettement né de l’engagement de caution, compte tenu de ses qualités subjectives et de la complexité de l’opération.
Ils reprochent à la Cour de pas avoir recherché comme elle y était pourtant invitée, si les cautions disposaient effectivement, eu égard à leur expérience dans l’activité professionnelle exercée par la société mise en liquidation et dans le domaine du crédit, de la compétence nécessaire pour apprécier le risque d’endettement né de leurs engagements de caution.
De plus, il appartient à l’établissement de crédit de démontrer qu’il a rempli son obligation de mise en garde à l’égard de la caution non avertie, au regard de ses capacités financières et des risques de l’endettement né de l’engagement de caution.
Aussi la Cour d’appel a violé l’article 1315 du Code civil en décidant que la caution ne rapportait pas la preuve de ce qu’il n’avait pas été mis en garde, tandis qu’il appartenait à la société BNP Paribas lease group de prouver qu’elle s’était assurée de sa capacité financière à faire face aux engagements du débiteur en cas de défaillance de ce dernier et qu’elle l’avait mis en garde sur les risques de l’endettement né de l’engagement de caution.
3) La réponse de la Cour de cassation : le crédit-bailleur doit démontrer qu’il a exécuté son obligation de mise en garde
La Cour de cassation sanctionne la décision de la Cour d’appel sur le fondement de l’article 1315 du Code civil : “Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation”.
Il appartient au crédit-bailleur, lorsqu’il est tenu d’une obligation de mise en garde, de démontrer qu’il l’a exécutée, en inversant la charge de la preuve, la cour d’appel, a violé le texte susvisé.
La qualité de caution avertie ne peut se déduire de sa seule qualité de dirigeant et associé de la société débitrice principale. Il appartient au crédit-bailleur, lorsqu’il est tenu d’une obligation de mise en garde, de démontrer qu’il l’a exécutée.