Le devoir de mise en garde de la caution
Le devoir de mise en garde de la caution par la banque résulte de l’obligation qu’à le banquier de rechercher l’existence d’un risque pour l’emprunteur.
Le banquier doit rechercher les risques de l’endettement né de l’octroi des prêts
La banque doit s’informer sur le patrimoine et les revenus de la caution, son état actuel d’endettement, afin de mesurer ses capacités financières et mesurer lui-même le poids que constituera le nouveau prêt, à la fois quant aux charges du prêt, mais aussi au regard de ses capacités financières et du risque de l’endettement.
Si la banque accorde un prêt à des époux, le prêt est accordé leurs capacités financières s’apprécient globalement (selon les ressources du foyer) et non à propos chacun pris séparément.
La collecte et l’analyse des informations ainsi collectées sont devenues une règle d’ordre public en droit du crédit au consommateur, le banquier ayant l’obligation de vérifier la solvabilité du candidat à l’emprunt : elle figure dans les articles L. 312-16 et L. 312-17 du Code de la consommation pour le crédit à la consommation, et L. 313-16 à 313-19 du même code pour le crédit immobilier.
Concrètement, il fait remplir une fiche de renseignements qu’il doit soigneusement conserver, car il peut être amené à devoir la produire si un contentieux s’élève par la suite avec l’emprunteur.
L’obligation du banquier de se renseigner sur la caution
le banquier doit se renseigner auprès de la caution et exiger les justificatifs de ses déclarations; la caution pour sa part, doit lui communiquer des renseignements exacts et loyaux à défaut desquels le prêteur est exonéré de toute responsabilité : la banque n’est pas supposée enquêter sur la véracité des renseignements qu’elle a obtenus et le mensonge du client se retournera contre lui.
Les risques de « l’endettement né de l’octroi des prêts » peuvent être invoqués par la caution.
La caution peut s’en prévaloir car le risque qu’elle encourt personnellement est d’abord lié au risque de non-remboursement du débiteur principal, et donc de l’inadaptation du prêt aux biens et revenus de ce dernier ou même parfois de l’absence de chances de succès de l’opération financée.
Le risque de disproportion du cautionnement
La caution encourt un second risque, celui la charge du prêt soit inadaptée à ses propres revenus, c’est-à-dire disproportionnée.
Il convient de distinguer deux degrés de disproportion : si vous êtes une caution personne physique et que vous vous êtes engagée envers un professionnel, vous pourrez tenter de faire valoir la « disproportion manifeste » existant entre votre engagement et vos biens et revenus pour espérer être complètement déchargée de son engagement (art. L. 332-1 ancien du Code de la consommation )
La caution non avertie (quelle que soit sa qualité et celle du créancier) peut se prévaloir de l’inadaptation du prêt à ses propres capacités pour établir le risque et obtenir des dommages et intérêts en cas de défaut de mise en garde.
A quel moment s’apprécie la disproportion ?
Le risque résultant de la disproportion entre le prêt et les capacités d’endettement de la caution s’apprécie au moment de la conclusion du contrat.
On regarde non seulement les ressources régulières et le patrimoine immobilier et l’endettement global de la caution donc les autres cautionnements et prêt souscrits.
S’il s’avère que les capacités financières de l’emprunteur sont adaptées à l’emprunt sollicité, le risque lié à l’endettement est absent et la mise en garde n’aura pas d’objet.
Seule la présence d’un risque justifie que le client en soit averti et que son attention soit attirée sur les conséquences de l’opération projetée.
Ainsi, en cas de prêt-relais, si la valeur du bien en attente de la vente ou si la situation patrimoniale de l’emprunteur suffisait à faire face au remboursement, la banque n’est pas tenue de mettre en garde son client, faute de risque né de l’endettement.
En revanche, il a pu être jugé que, dès lors qu’il est établi que l’opération était vouée à l’échec dès son lancement, la banque est tenue de mettre en garde l’emprunteur lors de la souscription de son engagement, peu important que celui-ci fût adapté à ses propres capacités financières.
Le banquier doit s’interroger sur le caractère averti ou non averti de la caution
Si le client est un emprunteur averti, l’établissement n’est pas tenu à une obligation de mise en garde, à moins, de manière exceptionnelle, qu’il ne dispose sur la situation financière de l’emprunteur de renseignements que ce dernier (peu probable) ou la caution (plus plausible) aurait ignorés.
Mais qu’est-ce qu’un emprunteur non averti ?
L’activité professionnelle de l’emprunteur est un indice de compétence dont la portée peut varier au gré de la complexité des opérations de crédit projetées.
L’appréciation du caractère averti par le juge se fait en regardant la complexité du produit souscrit, les prêts en devises ou les prêts structurés engendrant des risques qui sont plus compliqué à identifier que les prêts classiques.
Le cas du dirigeant caution
Le dirigeant qui s’est porté caution de sa société alors qu’il sollicitait un nouveau prêt en sa faveur est souvent considéré comme une caution avertie.
Il ne pourra engager la responsabilité du banquier que :
- si ce dernier lui a caché des informations
- si le dirigeant est inexpérimenté et sans formation sur la gestion de société
- s’il était patent que l’opération était vouée à l’échec.
La qualité d’averti d’une société s’apprécie à travers les qualités de son dirigeant : ce sont les compétences du dirigeant qui font de sa société une personne avertie
Le devoir de mise en garde en présence d’un risque pour un emprunteur non averti
En présence d’un risque et d’un emprunteur non averti, le banquier pourra accorder ou pas le crédit sauf à engager sa responsabilité pour soutien abusif de crédit.
Le banquier devra avoir attiré son attention sur le risque de l’endettement découlant du prêt sollicité.
La banque sera exonérée de toute responsabilité à l’égard de l’emprunteur qu’elle a mis en garde et qui ne peut plus rembourser.
Pour les prêts immobiliers, la banque a une obligation de refuser les crédits pour lutter contre le surendettement.
La banque a une obligation de ne pas contracter si l’évaluation de la solvabilité du consommateur rend prévisible sa défaillance (article L. 313-16, al. 1 du code de la consommation)
La prescription de l’action en responsabilité contre la banque court à partir de la conclusion du contrat
Le dommage résultant d’un manquement à l’obligation de mise en garde, consiste en une perte de chance de ne pas contracter et se manifeste dès l’octroi du crédit et la signature de l’acte de cautionnement.
L’évaluation de la perte de chance est toutefois souveraine et s’apprécie à l’aune des probabilités que la caution avertie aurait refusé de soutenir un ami ou un parent.
De plus, l’indemnisation de la perte de chance n’est due que dans l’hypothèse où la caution a été privée d’une chance d’éviter un risque qui s’est réalisé.
Elle suppose donc la réalisation de ce risque, c’est-à-dire que la caution s’avère ne pas être en mesure de faire face au paiement des sommes exigibles au titre du prêt
L’indemnisation est donc exclue si l’obligation de remboursement du prêt n’est pas arrivée à terme, comme c’est notamment le cas dans l’hypothèse où l’action en responsabilité est intentée avant l’échéance d’un prêt in fine.
En présence d’un montage associant un prêt in fine nanti par un contrat d’assurance-vie, la prescription de l’action en responsabilité intentée par le souscripteur court donc à compter du terme du prêt, puisque le risque que le rachat des contrats d’assurance vie ne suffise à le rembourser ne se révèle qu’à ce moment-là.